Type de document : article sociologique publié dans Agriculture and Human Values
Auteur : Marcel Sebastian
Résumé en français (traduction) : Neutralité émotionnelle professionnelle et rôle du travail sur les émotions de fond à l’abattoir
Alors que la plupart des personnes dans les sociétés occidentales se considèrent comme émotionnellement incapables d’abattre des animaux, les travailleurs des abattoirs sont quotidiennement impliqués dans l’abattage d’animaux. Cet article analyse la manière dont les travailleurs des abattoirs effectuent le travail émotionnel dans le contexte de l’abattage des animaux. L’étude empirique, basée sur 13 entretiens semi-structurés menés avec des travailleurs d’abattoirs allemands, montre que l’utilisation réussie de techniques de gestion des émotions conduit à une distance émotionnelle professionnelle vis-à-vis de l’acte de mise à mort. Pour les abatteurs interrogés, le fait de ne pas être émotionnellement affecté par la mise à mort des animaux est le résultat d’un travail émotionnel de fond, qui est l’expression d’un habitus émotionnel professionnel. Ce n’est que dans de rares cas, lorsque des émotions perturbatrices ont interrompu les routines familières pendant le travail, que le travail émotionnel sous-jacent a été mis en évidence et donc consciemment vécu et réfléchi. L’article contribue à la recherche sur le travail en abattoir en analysant systématiquement les techniques de travail émotionnel utilisées par les abatteurs. Il est novateur en ce sens qu’il introduit l’approche théorique des émotions d’arrière-plan et d’avant-plan dans les lieux de travail qui requièrent une neutralité professionnelle. Il montre que le travail sur les émotions d’arrière-plan est une condition préalable essentielle au travail en abattoir. Cet article apporte une contribution novatrice à la théorie et à la recherche sur la sociologie des émotions et du travail émotionnel, la sociologie des relations homme-animal et la sociologie de l’agriculture et de l’alimentation.
Résumé en anglais (original) : While most people in Western societies see themselves as emotionally incapable of slaughtering animals, slaughterhouse workers are involved in the killing of animals on a daily basis. This article analyzes how slaughterhouse workers perform emotion work in the context of slaughtering animals. The empirical study, based on 13 semi-structured interviews carried out with German slaughterhouse workers, shows that the successful use of emotion management techniques leads to professional emotional distance towards the act of killing. For the slaughterers interviewed, being emotionally unaffected by killing animals was the result of background emotion work, which was an expression of a professional emotional habitus. Only in rare cases, when disruptive emotions interrupted the familiar routines during work, was the underlying emotion work foregrounded and thus consciously experienced and reflected upon. The article contributes to research on slaughterhouse work by systematically analyzing emotion work techniques used by slaughterers. It is innovative in that it introduces the theoretical approach of background and foreground emotions in workplaces that require professional neutrality to the study of slaughterhouse work. It shows that background emotion work is an essential prerequisite for slaughterhouse work and invites further research on background emotion work in morally tainted jobs. The paper makes an innovative contribution to the theory and research on the sociology of emotions and emotion work, the sociology of human–animal relations, and the sociology of agriculture and food.
Publication ayant donné lieu à un article sur le blog de veille du Ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire
