Type de document : article publié dans Le Monde (édition abonnés)
Auteur : Caroline Rousseau
Extrait : Ces animaux domestiques, qui produisent la fibre pour des pulls et manteaux non synthétiques, sont victimes de pratiques cruelles, notamment en Australie. Largement alerté par les associations, le secteur de l’habillement ne peut plus fermer les yeux.
C’est un drôle de mot qu’on écorche une fois sur deux. Un anglicisme, sans équivalent dans notre langue, car il dérive du nom de l’inventeur de cette pratique, l’Australien John Hawkes William Mules. Le dénommé « mulesing » recouvre une réalité sanglante qui donne lieu à des vidéos insupportables diffusées par les associations de défense de la cause animale. On y voit des hommes coupant à vif la peau entourant l’anus de jeunes moutons souvent maintenus les quatre pattes en l’air par une machine. Les cisailles qui tranchent, les bêtes prises au piège sur le dos, les cris avant, pendant, après, la chair blessée, cautérisée ou pas, la peur qui gagne les agneaux attendant leur tour… Tout est choquant.
Le mouton mérinos, dont les mâles développent des cornes en spirales, est un animal fabuleux qui, au fil du temps, des sélections et des mutations génétiques, est passé de l’état sauvage (quand il était encore un mouflon) à celui de mammifère domestique capable de donner une belle laine, une bonne viande et du lait (pour les brebis, évidemment). Parce que son duvet aux brins longs et fins est particulièrement adapté à la filature, l’homme a cherché à optimiser le rendement de la bête : plus il y a de peau, plus il y a de laine.
Une pratique visant à protéger d’un parasite
Voilà pourquoi le mérinos est plein de plis. En Australie, où cette race est reine, 70 millions de moutons vivent dans une liberté quasi totale sur un territoire de 7,7 millions de kilomètres carrés, pour 25,7 millions d’habitants. Aux antipodes des images des élevages intensifs, avec des animaux entassés les uns sur les autres, cet élevage expansif australien permet à l’herbivore de se nourrir et de s’abreuver à sa guise… mais aussi de subir les assauts d’une mouche, la lucilie cuivrée, qui aime pondre ses œufs dans les plis du mérinos, au niveau de l’arrière-train notamment.
Une fois éclos, les œufs deviennent des larves qui dévorent la chair du mammifère qui les héberge malgré lui et engendrent d’atroces souffrances, voire la mort si des soins ne sont pas apportés rapidement. [fin de la partie disponible sans abonnement].